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L'Europe est-elle en retard sur le plan technologique ? Il est temps de changer de mentalité

L'Europe est-elle en retard sur le plan technologique ? Il est temps de changer de mentalité

Soyons honnêtes : lorsque vous pensez à la technologie de pointe, votre esprit traverse probablement l’Atlantique pour se rendre dans la Silicon Valley, ou peut-être de plus en plus, en Asie. Depuis trop longtemps, l’Europe semble être à la traîne, en particulier dans le domaine numérique. Nous sommes massivement dépendants des solutions technologiques venues d’ailleurs, et c’est une tendance à laquelle il faut remédier.

En tant que personne qui a construit de nombreux systèmes logiciels, je l’ai constaté de première main. Mon travail, comme celui d’innombrables autres, repose presque entièrement sur les serveurs des grandes entreprises technologiques américaines – AWS, Azure et Google Cloud. On ne m’a jamais demandé de déployer une application sur un fournisseur européen comme Hetzner ou Scaleway. Cette dépendance s’étend également à nos outils quotidiens : Microsoft Office, Google Workspace, Slack, Dropbox, Notion – ce sont tous des produits SaaS américains. Cela signifie un flux constant de nos données vers nos homologues d’outre-Atlantique. Et en matière de production physique, nous sommes loin derrière la Chine, qui est devenue la plaque tournante mondiale de la fabrication.

Même dans le domaine en évolution rapide de l’IA, nous nous retrouvons à devoir rattraper notre retard. Tout le monde utilise ChatGPT, et j’utilise même Gemini pour m’aider à rédiger ce billet. Bien que j’aimerais adopter des alternatives européennes comme Le Chat de Mistral, elles n’ont tout simplement pas atteint la même adoption généralisée.

Pourquoi nous sommes en retard : plus que de la simple technologie

Notre dépendance à l’égard de la technologie étrangère ne tient pas seulement à un manque d’innovation ; elle est enracinée dans plusieurs problèmes systémiques. Il existe un écart important en matière de capital-risque entre l’Europe et les États-Unis, en particulier lorsqu’il s’agit de faire évoluer des entreprises. Les startups européennes ont souvent du mal à lever les fonds importants et tardifs nécessaires pour concurrencer à l’échelle mondiale, ce qui les oblige parfois à rechercher des investisseurs américains ou même à se relocaliser. Cela est en partie dû à la fragmentation des marchés de capitaux dans l’UE, qui crée des bassins de capitaux privés plus petits par rapport au marché américain unifié.

Il existe également une différence culturelle perçue dans l’appétit pour le risque chez les investisseurs et les entrepreneurs. Les investisseurs européens sont parfois considérés comme plus prudents, privilégiant une traction avérée aux idées ambitieuses de “coup de lune”. Cela peut contribuer à une fuite des cerveaux, où les meilleurs talents technologiques, cherchant des opportunités plus attrayantes et souvent des salaires plus élevés, quittent l’Europe pour les États-Unis. De plus, les startups européennes peuvent avoir moins accès à une infrastructure cloud de pointe, à des environnements de test avancés et à de grands ensembles de données par rapport à leurs homologues américaines, ce qui peut ralentir le développement et la mise à l’échelle des produits.

Il n’est pas trop tard : leçons de la Chine

Mais voici le point crucial : tout cela peut être corrigé. La Chine a prouvé qu’un changement radical est possible. Je me souviens d’une époque où “Made in China” était synonyme de bibelots bon marché et jetables. Avance rapide jusqu’à aujourd’hui, et la Chine produit des produits de premier ordre mondial, des véhicules électriques et des appareils électroniques (oui, y compris les iPhones) à l’acier et aux panneaux solaires. Ils se sont transformés en chef de file dans d’innombrables industries, fabriquant des produits d’une qualité énorme.

Cette incroyable transformation nous montre qu’il n’est absolument pas trop tard pour que l’Europe reprenne pied. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un changement fondamental de mentalité et d’élan. Le cheminement de la Chine, de la production de “camelote” à des produits de premier ordre mondial, a pris quelques décennies. Nous devons accepter où nous en sommes et commencer à prendre en main notre avenir technologique.

La voie à suivre : l’unité plutôt que la division

Surtout, l’Union européenne doit relever ce défi dans un ensemble cohérent. L’idée que les États membres tentent de résoudre les mêmes problèmes de manière indépendante nous a conduits à cette situation. Nous devons y faire face unilatéralement ensemble.

Bien sûr, il y a des obstacles importants à surmonter :

  • Barrières linguistiques : L’Europe est incroyablement diverse, et la langue est un facteur de division primordial. En dehors de leur langue maternelle, seulement environ 50 % des habitants de l’UE peuvent tenir une conversation en anglais. Pour créer des produits véritablement européens, les capacités multilingues doivent être intégrées dès le début, ce qui ajoute indéniablement de la complexité.
  • Différences culturelles : Notre riche mosaïque de cultures, bien que constituant une force, peut également présenter des défis en matière de normalisation des approches et de développement de produits.
  • Nationalisme vs. Coopération : Une partie de la population de l’UE privilégie les idéaux nationalistes à une coopération internationale accrue, ce qui peut entraver les efforts unifiés.
  • Réglementations variées : La mosaïque de règles et de réglementations différentes entre les États membres rend difficile la mise à l’échelle des solutions à l’ensemble du bloc. Si le RGPD est loué pour la protection de la vie privée, sa complexité et son application incohérente peuvent parfois étouffer l’innovation, en particulier pour les petites startups, en créant des obstacles à l’utilisation des données pour le développement de l’IA.

Initiatives prometteuses à l’horizon

Malgré ces défis, il existe des initiatives très prometteuses déjà en cours :

  • Le rapport de Mario Draghi sur la compétitivité de l’UE a certainement suscité d’importantes conversations.
  • Le projet de portefeuille d’identité numérique de l’UE est un excellent concept qui doit absolument devenir une réalité, rationalisant les interactions numériques et renforçant l’autonomie des citoyens.
  • EU Inc est une initiative qui plaide pour une entité commerciale et une structure fiscale standardisées dans toute l’UE, ce qui changerait la donne pour les entreprises opérant au-delà des frontières.

Et n’oublions pas que l’Europe a ses propres réussites technologiques. Nous avons juste besoin de beaucoup plus de ces réussites pour pouvoir concurrencer à l’échelle mondiale.

Commençons la conversation

Au cours des prochaines semaines, j’ai l’intention d’approfondir chacun de ces points, en explorant les subtilités et les solutions potentielles. Nombre de ces idées sont, à ce stade, plus mes opinions et mes sentiments que des données concrètes. Une partie de l’objectif de ce blog est d’ouvrir cette discussion et d’être exposé à des faits et opinions divers d’autres personnes. Si vous pensez que quelque chose que j’ai dit est inexact, n’hésitez pas à me contacter. Je suis toujours heureux de corriger ou d’ajuster mes opinions si je me trompe manifestement sur quelque chose.

En fin de compte, l’UE doit équilibrer une réglementation cruciale avec un accent fort sur la promotion de l’innovation et la création d’un environnement où les startups peuvent prospérer et se développer. Il ne s’agit pas seulement de politique gouvernementale ; il s’agit également de cultiver une culture de startup plus entrepreneuriale, tolérante au risque et ambitieuse à l’échelle mondiale à travers l’Europe. Ce blog est une tentative de rassemblement avec des personnes qui veulent construire cet avenir. Pour discuter des progrès ensemble. Pour présenter les projets prometteurs. Pour célébrer les succès et les échecs afin d’y parvenir.